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« C’est moi »

Texte de référence : Jean 18. 1-12

Nous voici dans le jardin, celui dans lequel Jésus et ses disciples avaient l’habitude de passer du temps ensemble. Mais l’heure n’est ni à l’étude ni au chant de cantiques joyeux. L’heure est sombre, et ce malgré l’arrivée de gardes et de grands-prêtres munis de torches et de lampes allumées. Petit détail que l’on trouve uniquement chez Jean. Petit détail qui pourrait avoir son importance tant l’ironie est criante ici : c’est avec des torches et des lampes, par une heure sombre, que l’on vient se saisir de celui qui est la « lumière du monde »… À méditer ! 

Mais ce n’est pas tout ! Jésus n’a pas l’air surpris de l’arrivée de cette cohorte venue l’arrêter. Dans ce jardin, Jésus est chez lui, et c’est donc assez normalement qu’il vient accueillir les hommes qui, d’une certaine manière, « frappent à sa porte ». 

Les gardes, pour avoir observé Jésus, savent très bien qui ils viennent prendre. Judas, quant à lui, pour l’avoir accompagné pendant plusieurs années, n’aurait pu avoir la moindre difficulté à reconnaître son « rabbi » dans ce décor si familier. 

Et pourtant, au « c’est moi » prononcé par Jésus, tous ont un mouvement de recul et tombent par terre. Jean n’avait-il rien d’autre à nous dire, rien de plus important à nous raconter que ce « gag » malvenu à cette heure-ci ?! 

“Mais c’est tout sauf un gag” pourrait-il nous dire en nous regardant sérieusement ! Ni Judas ni les gardes ne se sont heurtés à une pierre ou une branche que, dans le noir, ils n’auraient pas vu. S’ils tombent, c’est à cause de la tournure des événements ! Jamais ils n’auraient pensé que ce Jésus se serait livré de la sorte, allant lui-même au-devant d’un ennemi pourtant plus nombreux et pourvu d’armes en tous genres pour parer à une riposte éventuelle. Qu’importe, les voici à terre le temps d’un instant. À la renverse. 

Surpris, ils l’ont sûrement été. Mais il y a plus. Jean met ici en valeur la gloire de Jésus. Car rien ne se fait sans son accord : Jésus ne se laisse pas arrêter, il se donne. C’est lui qui décide. C’est lui qui est maître de la situation. La non explication d’un tel mouvement de recul semble nous dire la majesté de celui qui se donne. Majesté devant laquelle on ne pourrait que reculer… et tomber à terre. Ce « c’est moi » abasourdissant, est sûrement pour Jean une façon de révéler l’identité de Jésus. Car ce « c’est moi », c’est l’équivalent du « Je suis » déjà prononcé à plusieurs reprises pour mentionner sa supériorité sur Abraham (cf. Jean 8). C’est l’équivalent du « Je suis » prononcé par Dieu quand Moïse lui a demandé son nom (cf. Exode 3).

Dans ce jardin, dans cette pénombre, voilà que « Je suis » se donne. Oui, « Je suis » ne saurait être pris comme un vulgaire brigand ! Les gardes tombent, Judas tombe, mais Jésus est debout. Il maîtrise tout. Ce chemin vers la croix, il le brave, et c’est lui qui en prend l’initiative. 

Pour Jean, le récit de cette chute de soldats est donc plus qu’un gag malvenu. C’est l’effet d’une révélation, celle du Christ glorieux. Sa vie, on ne peut la lui prendre, c’est lui qui la donne ! Et voilà pourquoi… c’est important ! 

Kévin Commere