La nature comme on l’aime

L’été est  propice aux déplacements massifs. Des millions de français partent ainsi rejoindre une destination mythique. Néanmoins, un certain nombre préfère des destinations anonymes où ils pourront admirer la nature en toute quiétude. Une information efficace sur les vertus de l’écologie n’y est pas étrangère, entraînant régulièrement de nouveaux adeptes.

Qu’ils sont beaux ces sites sauvages que l’homme n’a pas défigurés ! Jusqu’au moment où l’épine d’une ronce se fiche dans le pied, jusqu’au moment où tiques et moustiques en veulent à notre peau, jusqu’au moment où des mouches grasses et hardies s’invitent à partager notre pique-nique tandis que des hordes de fourmis envahissent nos jambes… Les films naturalistes avaient oublié d’inscrire ces précieuses petites bêtes à leur générique. 

Bien sûr, il reste les villages tellement mignons qu’on rêve de pouvoir s’y installer un jour. Mais comment les campagnards peuvent-ils manquer de goût au point de laisser un coq chanter aux aurores, ou des vaches meugler pendant la sieste ? Pire, comment laisser les cloches de l’Église rappeler les heures de façon inopportune ? Déception… La campagne ignore les critères d’une vie calme et reposante comme doit l’être une vie naturelle. Et ne parlons pas des effluves émanant des animaux ; on en vient à regretter les rassurants gaz hydrocarbonés des rues de nos villes.

Heureusement, il est des responsables qui veillent à améliorer la qualité de vie de nos campagnes, afin de les rendre plus fréquentables. Des parcours-découverte soigneusement élaborés permettent de découvrir une nature désirable et bienveillante, sans risque de rencontres décevantes, voire rebutantes. Dans d’autres lieux, des terrains marécageux sont réhabilités en zones humides riches de biodiversité par la grâce du vocabulaire. D’une réputation peu enviable, on passe à un statut prometteur. 

C’est ainsi qu’un ami agriculteur exploitant une vaste prairie inondable, jongle avec les intempéries pour en tirer année après année un foin de qualité moyenne. Or, la voilà en cours de classement en zone humide à vocation pédagogique. Enviable promotion ! De volumineux dossiers ont été élaborés, rassemblant la réglementation devant régir désormais la prairie. Plus question de la faucher en fonction de la météo ; la date raisonnable sera fixée par décision administrative. Evidemment peu instruit des choses de la nature, l’agriculteur ignorait à quel point il pouvait déranger la biodiversité. Et cette grave atteinte sévit depuis des générations. Il était temps de redonner la priorité à la nature… en incluant un parcours pédagogique qui permettra à des dizaines de personnes de piétiner le sol pour apprendre à préserver ce lieu de toute prédation humaine.

Nature réglementée, nature adaptée au tourisme… La Bible appelle à l’humilité : « Est-ce à toi de chasser une proie pour la lionne ? Est-ce à toi d’apaiser l’appétit des lionceaux,  quand ils sont accroupis au fond de leur tanière ou qu’ils se tiennent à l’affût dans les fourrés ? » (Job 38:39-40). 

Si Dieu appelle à prendre soin de sa création, il alerte sur la prétention à se croire capable de tout maîtriser.

Pierre Lugbull