Qu’est-ce que la vérité ?

Peut-être êtes-vous accros à ces enquêtes policières des programmes télé. Les enquêteurs, de préférence atypiques, s’attachent à rechercher l’auteur d’un crime ainsi que son mobile. La recherche de la vérité des faits progresse via des méandres plus ou moins complexes truffés de fausses pistes. Invariablement, le coupable finit par être confondu. Soulagement !

Les faits divers réels ne suivent pas toujours ces scénarios bien huilés. Après le menottage du coupable, il reste la vie des proches de la victime… et celle des proches du coupable. Puis vient le procès faisant apparaître des vérités nuancées, voire contradictoires. Les avocats rivaliseront alors d’art oratoire pour tenter d’accréditer leur vérité. 

Etablir LA vérité est beaucoup plus ardu. Lors d’un procès historique célèbre, le gouverneur romain, Pilate, s’enquérant des faits ne trouva que cette conclusion lapidaire : « Qu’est-ce que la vérité ? ». Il venait d’entendre Jésus lui dire : « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jean 18.37). Pilate s’était suffisamment frotté au pouvoir romain pour croire encore en une quelconque vérité.

Il y a de quoi aujourd’hui être tout aussi désabusé que Pilate. Toute opinion aussi extrême soit-elle se prétend vérité. L’explosion des moyens de communications permet la prolifération de ces vérités aussi diverses que contradictoires. J’ai connu un homme ayant pour habitude de demander : « ce que tu me dis là, c’est la vérité vraie ? ».

Si cela peut nous rassurer, le problème n’est ni de notre époque, ni de celle de Pilate. Plus de 4 siècles avant le procès de Jésus, les carrières politiques de la Grèce étaient en train de se professionnaliser. Des spécialistes du discours furent alors recrutés par ces politiciens pour faire pencher l’opinion en leur faveur. Peu importait la valeur des arguments développés, pourvu qu’ils aient une apparence de vérité et soient assénés avec aplomb. 

Des détracteurs de cet art de la tromperie se firent une joie de montrer l’ineptie de ces discours. Il suffit d’assembler deux de ces « vérités » pour déboucher sur les pires absurdités. Un petit exemple pour le plaisir :

Plus il y a d’emmental, plus il y a de trous

Or, plus il y a de trous, moins il y a d’emmental

Donc, plus il y a d’emmental, moins il y a d’emmental !

De quoi faire carrière dans le monde du commerce !

Les fausses vérités de ce genre foisonnent, répandues avec assurance sans s’interroger sur leur solidité, au risque de l’absurde.  Allez, un petit exemple classique de notre époque :

Le malheur vient de Dieu

Or Dieu n’existe pas

… Donc le malheur n’existe pas… Conclusion logique !

Finalement, à tous les artistes de discours biaisés, je préfère Jésus affirmant : « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité ». Il a maintenu cette vérité, LA vérité, jusqu’au bout, au prix de sa vie. De quoi interroger les professionnels de la communication et de la conquête du pouvoir.

Pierre Lugbull