Qu’est-ce qu’on attend ?

Attendre. Voilà qui met les gens en rogne aujourd’hui. Dans notre société on déteste attendre, on veut que tout soit prêt tout de suite. Si nos désirs ne deviennent pas réalité à la minute où ils nous viennent en tête, nous voilà frustrés. Attendre ? C’est trop cruel… 

Pourtant, qu’on le veuille ou non, et ce quel que soit le domaine, nous sommes toujours dans l’attente de quelque chose. Prenons la politique par exemple. À tort ou à raison, on a souvent l’impression qu’une grande partie de la vie politique française se joue lors des élections présidentielles. Malgré le fort taux d’abstention, grande est l’attente (ou la crainte ?) de voir s’afficher le visage de celui (ou celle) qui occupera les plus hautes fonctions de l’État pendant les cinq années à venir. Mais une fois son visage dévoilé, plus question de commenter le passé, il faut passer à l’étape suivante : l’attente de ce qu’on nomme le « troisième tour » des élections présidentielles : les législatives ! D’une attente à une autre… De même, après avoir attendu en vain la victoire de Madame Le Pen aux élections 2022, les sympathisants n’avaient plus qu’une seule demande : faire cesser l’atermoiement du flou laissé quant à la possibilité de sa candidature pour les éléctions suivantes. D’une attente, à une autre. 

Autre univers, plus proche de nous encore, celui de la santé. Y a-t-il un domaine dans lequel on attend plus que celui-ci ? Dans nos esprits ou de manière très concrète, on passe sans arrêt d’une salle d’attente à une autre ! De l’attente d’une prise en charge, on passe à l’attente d’un diagnostic redouté. Puis c’est l’attente de l’intervention suivie de celle de la récupération, puis de la guérison, etc. 

Et que dire de nos relations avec les autres ? Même chose n’est-ce pas ? De la considération, à une demande de pardon, on peut attendre (dans les deux sens du terme) énormément de la part de ceux qui nous entourent. 

Nous détestons attendre mais le temps fait tellement partie de ce que nous sommes, qu’il est inévitable de nous plierà son rythme, et donc d’attendre ce qui vient. Mais l’attente n’est pas toujours quelque chose de négatif, c’est aussi le pouvoir de se projeter. L’attente c’est aussi le désir de ce qui vient, pas seulement la crainte de la tuile qui, peut-être nous tombera dessus. Car nous les humains, nous avons été fabriqués pour penser à l’avenir, nous avons été créés pour nous projeter toujours un peu plus, pour imaginer, pour anticiper ! N’est-ce pas là, entre autres, la raison pour laquelle les audiences des bulletins météo sont toujours très élevées ? 

Alors que beaucoup, en maison de retraite ou sur leur lit de mort, confessent ne plus attendre grand-chose de la vie, force est de constater leur intérêt pour le devenir de leurs enfants ou petits-enfants, leur souhaitant le meilleur, ou leur donnant quelques dernières recommandations. 

Et puis, même quand on ne s’attend plus à rien, on attend tout de même quelque chose ; c’est le « quand m’en irai-je ? » des athées, le « quand est-ce que le Seigneur me reprendra à lui, m’a-t-il oublié ?» des croyants. Sans qu’on s’en rende compte, on attend toujours le prochain épisode. 

Dans la Bible, l’attente a une place très importante. À vrai dire, dès le troisième chapitre de la Genèse, le lecteur est plongé dans l’attente d’une guérison promise. Mais celle-ci prend du temps à se mettre en place. Se dévoilant au fil des millénaires, elle a atteint son apogée lors de la venue de Dieu sur la terre en la personne de Jésus. Mais contre toute attente (!), après le succès de sa mission par sa victoire sur la mort, Jésus retourne au Père et commande à ses disciples… d’attendre. Encore. Fatiguant n’est-ce pas ? Pas tant que cela, car savoir que l’objet promis (la guérison absolue) nous sera accordé, remplit de confiance le temps d’attente, quelle qu’en soit la durée. La Bible appelle cela la « foi ». Cela ne change pas tout, mais quand même ! « La foi est une façon de posséder ce qu’on espère, c’est un moyen d’être sûr des réalités qu’on ne voit pas. » (Hébreux 11.1). C’est dans cette espérance du monde nouveau promis par Dieu que l’on peut déjà dire que cela vaut le coup d’attendre !

Kévin Commere