Casser les codes ?

Maîtriser les codes ou les casser ?

Récemment, j’ai relevé une réflexion qui m’a interloqué. Evoquant des classes post bac, un enseignant expliquait que ses élèves avaient besoin de l’école pour apprendre les codes de la vie en entreprise. Ces jeunes bacheliers ne pouvaient décrocher de stage en entreprise. En cause, la non-maîtrise des codes : langage, habillement, ponctualité, hiérarchie…  Il leur fallait au moins une année scolaire supplémentaire pour être préparés à ces codes.

Encore étonné de ces propos sur la difficulté de maîtriser les codes, j’apprends la mort de Karl Lagerfeld. Lui qui a « cassé les codes » jusqu’à finir prisonnier de sa propre image de casseur de code. Prisonnier d’un personnage virtuel à l’image parfaitement codifiée.

Karl Lagerfeld a été à la fois le chantre et le produit d’une société dont le credo est de créer sans cesse des nouveautés suscitant l’envie d’acheter. Peut-on encore imaginer une publicité soulignant la qualité d’une lessive, sans qu’y soit associés monde féérique ou exubérance joyeuse. La lessive n’a pourtant pas de quoi mettre les foules en liesse, mais il faut casser les codes si l’on veut se démarquer des concurrents.

S’il en est qui ont planché sur les histoires de codes, ce sont bien les ingénieurs californiens de la Silicon Valley. Coder évidemment les marchés boursiers, mais aussi toutes les réalités de la vie, jusqu’aux questions de santé. Est-ce pour faire oublier leur ambition qu’ils ont prôné, eux aussi, la nécessité de casser les codes. Fini le costume cravate au bureau, ce code des cadres d’entreprises. Désormais, tenue décontractée… obligatoire bien sûr si l’on veut faire partie de l’élite des casseurs de code. Gare à celui qui n’a pas de baskets aux pieds !

La frénésie de casser les codes gagne du terrain. Se laisser imposer un code de la route ? Et ma liberté alors ? Tiens, pendant que nous y sommes, pourquoi rouler à droite ? Les Anglais roulent à gauche et ne s’en portent pas plus mal. Eh oui, un seul homme nous a imposé la droite sur la route : Napoléon. Occasion de se démarquer des Anglais, en cassant un code admis par tous jusque-là : rouler à gauche.

S’il en est un qui a cassé les codes, c’est bien Jésus, frayant avec ce que la société produisait de moins reluisant. Et pourtant, il disait n’être pas venu pour abolir la Loi, mais pour l’accomplir. La loi ! Quand Napoléon a finalisé le Code civil, cela répondait au besoin d’un vivre ensemble : un même code à Paris ou en Bretagne. Une façon de se libérer de l’arbitraire des seigneurs locaux. Loin d’une contrainte, le Code civil concrétisait une nouvelle liberté.

Jésus nous appelle à maîtriser un Code appuyé sur 2 piliers : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ta force, et ton prochain comme toi-même ». Avec totale liberté de décliner ces 2 points en les adaptant à chaque situation. Sans hésiter à casser les codes généralement admis, pourvu que ces 2 fondements soient validés.

Pierre Lugbull