Peut-être avez-vous suivi les cérémonies de réouverture de Notre-Dame de Paris le 8 décembre ? Je m’y suis laissé prendre au moins en partie. Les organes d’information ont rivalisé de moyens pour en faire un évènement de portée mondiale. La 2ème grande célébration à Paris en 6 mois… Car, impossible d’avoir oublié celle de l’été dernier, l’ouverture spectaculaire des Jeux Olympiques. Des JO à la Cathédrale, c’est le grand écart. Et pourtant…
En effet, une similitude interpelle. Des hommes et des femmes d’exception ont été la raison d’être de ces cérémonies. D’un côté, des sportifs de très haut niveau, de l’autre des professionnels experts en leur métier. Sportifs défiant les risques par leur maîtrise du BMX ou pompiers s’aventurant à la limite du raisonnable, ou bien encore cordistes flirtant avec le vide. D’autres ont soigné la plus extrême précision : tireurs à l’arc lors des JO ou patineurs d’objets d’art à Notre-Dame…
Quels que soient le domaine de leur prestation, chacun, chacune méritait un hommage, non seulement pour la qualité du travail accompli, mais aussi pour la consécration et la persévérance nécessaires à l’aboutissement de leur investissement. Bon, me direz-vous, la similitude s’arrête là. La finalité des uns est de décrocher une médaille, la finalité des autres est la participation quasi anonyme à une œuvre communautaire dépassant leur personne.
Néanmoins, les deux cérémonies ont laissé une large place à la dimension religieuse. Une évidence pour la cathédrale, plus inattendue lors des JO. Le choix d’évoquer les fêtes païennes d’Olympie à l’origine des JO avait d’ailleurs provoqué une réaction des évêques de France, y voyant un détournement des symboles évangéliques. La « résurrection » de NotreDame se devait donc de rectifier l’image de la foi.
Ainsi, après l’hommage rendu aux artisans, un impressionnant cortège d’ecclésiastiques s’est avancé vers le « portail du jugement ». De sa crosse épiscopale, l’archevêque de Paris frappe 3 coups et interpelle l’édifice : « Notre Dame, modèle de foi, ouvre tes portes… ». Mais les portes restent fermées. Encore 3 coups avant une nouvelle interpellation : « Notre Dame, mère très aimante, ouvre tes portes… ». Le scénario se renouvelle une 3ème fois : « Notre Dame, témoin de l’espérance, ouvre tes portes… ». Et la porte s’ouvre ! Notre-Dame n’est donc pas qu’un chef d’œuvre de pierre, de bois et de verre, elle est une personne, mystérieuse, mère chargée de nous guider vers les valeurs spirituelles.
Les ecclésiastiques ayant rejoint à l’intérieur les grands de ce monde, vient le temps de faire résonner l’orgue restauré. Interpellation solennelle par l’archevêque : « Éveille-toi, orgue, instrument sacré ». Après sept interpellations supplémentaires l’orgue consent à remplir son office… Instrument ou personnage sacré…
Alors qu’avance la cérémonie dédiée à Notre-Dame, je m’interroge : où est le Fils de cette « Mère très aimante » ? Resté dans le froid extérieur en ce temps de l’Avent ? Pas de place pour lui comme à Bethléem ? A moins qu’il ait choisi d’ignorer une pompe religieuse qui lui est étrangère.
Pierre Lugbull