Vendredi (Temps de Pâques)

« Après cela, pour que l’Écriture soit accomplie, Jésus, sachant que déjà tout était achevé, dit : J’ai soif. Il y avait là un récipient plein de vin aigre. On fixa à une tige d’hysope une éponge imbibée de vin aigre et on l’approcha de sa bouche. Quand il eut pris le vin aigre, Jésus dit : Tout est achevé. Puis il baissa la tête et rendit l’esprit. » Jean 19. 28-30.
Jusqu’au bout. 
Quelles images vous viennent en tête à l’évocation du mot « marathon » ? J’en vois deux en ce qui me concerne. Je vois tout d’abord les concurrents sur la ligne de départ. Certains sont concentrés et ne laissent rien transparaître et les autres affichent leur joie d’être là, tout sourire. Peut-être que ces derniers ne savent pas encore à quel point courir un marathon est exigeant.
L’autre image qui me vient en tête, bien plus rapidement d’ailleurs, c’est l’arrivée des coureurs. À ce moment de la course, les sourires sont moins évidents. Pour la plupart des coureurs il faut les deviner et pour d’autres encore il est tout simplement impossible de les distinguer ; les marques de l’effort produit ont remplacé toutes traces de l’excitation du départ. En les regardant arriver on n’a aucune peine à comprendre que ce sont des coureurs courageux, ils sont allés jusqu’au bout de leur effort.
Jésus est lui aussi en bout de course. Mais c’est celle de sa vie.
Toute cette dernière semaine, Jésus aura souffert. Pas seulement de l’intensité des coups qu’il aura reçu toute cette dernière journée (qui d’autres auraient pu les supporter ?), mais aussi de la pression morale suite à l’attente de ce jour. Même si Jésus a aussi profité de la vie qui lui était donnée sur terre, je n’ai pas grand mal à imaginer que chaque guérison, chaque miracle effectué, chaque parole d’espoir donnée lui rappelait qu’il aurait, un jour, à passer à la caisse pour payer tous les cadeaux qu’il était en train d’offrir.
Jésus a donné la santé, donné espoir, allégé les fardeaux des hommes et des femmes qu’il rencontrait et a, en échange, «endossé» sur lui tout ce qui méritait la colère de Dieu.
Après avoir tant souffert physiquement (Jésus mourra bien avant que les soldats ne viennent lui briser les jambes pour l’asphyxier immédiatement), après avoir tant souffert spirituellement (Jésus, le saint devint péché du monde cf. 2 Corinthiens 5. 21) Jésus savait qu’il était arrivé au bout de cette mission si difficile.
Ni aucune âme ni aucun péché pour lequel Jésus était venu n’a été oublié. Quant à la séparation d’avec Dieu qui devait nous revenir, Jésus l’a pleinement vécue pendant ces heures sombres.
Mais comme pour bien finir une course interminable, Jésus demande à boire. On lui apporte alors la boisson populaire chez les soldats romains. Jésus voulait-il vraiment se désaltérer à ce moment de la passion ? Je crois plutôt qu’il voulait dessécher sa langue qui, comme dit le psaume 22, s’attachait à son palais (verset 18). Ayant bu, Jésus pouvait alors prononcer à haute et distincte voix les mots qu’il voulait que le monde entier retienne à la fin de son marathon : « Tout est achevé ».
Par ces mots, Jésus affirme qu’il n’est plus très loin du triomphe. Seule la mort physique (celle qu’il avait déjà terrassée en ressuscitant Lazare et bien d’autres) reste à vaincre.  Par ces mots, Jésus nous invite, nous aussi, à considérer la globalité de son œuvre: de la crèche…à la croix. Jusqu’au bout.
« On fixa à une tige d’hysope une éponge imbibée de vin aigre et on l’approcha de sa bouche. Quand il eut pris le vin aigre, Jésus dit : Tout est achevé. Puis il baissa la tête et rendit l’esprit. » Jean 19. 29-30