Eloge du gaspillage

Eloge du gaspillage
Il y a une quarantaine d’années, en pleine crise pétrolière, le gouvernement français lançait la « chasse au gaspi ». Une campagne encourageant chacun à économiser le carburant, alors que les départs en congés étaient imminents. Mais pas question de gêner qui que ce soit, pas question d’austérité, juste un plan gagnant-gagnant surtout pour les vacanciers. Par une conduite adaptée, ils économiseraient 15% de carburant, et l’Etat 120 millions de francs. On ne comptait pas encore en euros, mais déjà on comptait.
Depuis cette heureuse et insouciante époque, la chasse au gaspi a gagné bien d’autres domaines : les ressources naturelles, l’eau, l’alimentation,…  Dès que les affaires politiques s’essoufflent, le thème du gaspillage refleurit.  Gaspillage défini comme «l’utilisation d’une ressource de manière non rationnelle ». L’importance et la gravité en sont mesurées à coups de chiffrages vertigineux.
Comme il y a 40 ans, le gaspillage s’explique et se soigne d’abord par des chiffres. Entre les tonnes et les euros affublés de préfixes en kilo ou en méga voire plus, tout est dit. L’« utilisation rationnelle des ressources » permettrait de gagner plus en comptant mieux. Ceci sans nuire au bien-être de chacun, évidemment… comme il y a 40 ans.
Alors que nous nous émerveillons au printemps de l’explosion de la végétation, sommes-nous conscients que là aussi, il y a gaspillage ? Une débauche de pollen honnie par plus d’un allergique. Dispersée par le vent, la majorité de ce pollen retombera au sol sans n’avoir rien fécondé. Quel gaspillage ! Un défi à « l’utilisation rationnelle des ressources ». Et que dire aussi des centaines de millions de spermatozoïdes émis alors qu’un seul fécondera l’ovule disponible ? Gaspillage défiant toute logique !  
Le Créateur, Lui, est étranger à « l’utilisation rationnelle » des ressources. Car Il n’en est pas le consommateur, il en est le fournisseur. Et il fournit en abondance, même en surabondance. Chez lui, pas de calcul au plus juste. Il offre gratuitement et invite les hommes à user des biens de sa création de façon responsable certes, mais d’abord avec reconnaissance. En offrant à nos regards la surabondance de sa création, le Seigneur n’incite pas à l’insouciance, mais à se tourner vers lui, le Père bienveillant, emplis de reconnaissance pour sa générosité dépassant tout calcul.
Ce Père a tellement aimé l’humanité qu’il est allé jusqu’à lui donner son Fils, afin de la sauver de sa folie. Sans calculer s’ils en valaient la peine, il s’est offert au mépris des hommes et à leurs coups en la personne de Jésus. Pour qu’à travers sa mort et sa résurrection ils soient libérés. Tout bon spécialiste en « utilisation de ressource » s’étranglerait devant un tel gaspillage : c’est insensé ! Le Seigneur, Lui, parle d’abondance, et même de surabondance. Surabondance de grâce et d’amour pour une humanité ne voyant son salut que dans la quantité de sa consommation.
« En Jésus-Christ, il a montré la richesse surabondante de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus–Christ » (Ephésiens 2:7)
Pierre Lugbull