Les gilets jaunes

S’il est un sujet sur lequel il est risqué de s’aventurer, c’est bien celui des gilets jaunes. Vous en êtes peut-être un farouche partisan ou un détracteur absolu. Laissons de côté la polémique pour nous attarder sur un point de ce mouvement. Les médias sont unanimes : c’est le premier mouvement de contestation issu des réseaux sociaux, sans organisateur. Mais est-ce si évident ?

La vidéo de Jacline, une Bretonne, a été vue parait-il des centaines de milliers de fois, critère absolu de l’importance de son message. Elle serait à l’origine de la déferlante des gilets jaunes. Jacline n’est pas n’importe qui : sa spécialité est de débusquer ce qui nous veut du mal. Elle alerte sur bien des dangers : des compteurs espions Linky aux traces blanches des avions chargées de particules destinées à influencer nos pensées. Sa spécialité absolue est l’étude des ectoplasmes. Non pas ceux d’un certain capitaine de BD, mais ces entités sans existence matérielle rôdant autour de nous.

Gênés par cette étrange maternité, certains  suggèrent qu’en réalité le mouvement est né spontanément du bon sens du peuple. Ce n’est pas une première. Qui n’a entendu l’histoire du peuple partant spontanément détruire la Bastille ? Bien avant internet et les réseaux sociaux. Les lendemains ont révélé des leaders sociaux pas toujours très sociables.

Des mouvements populaires spontanés, la Bible en relate plusieurs. Déjà !

Ainsi, au 1er siècle, à Ephèse dans la Turquie actuelle, la foule en colère envahit la ville, scandant pendant plus de 2 heures : « Grande est l’Artemis des Ephésiens » (Actes 20). Confusion totale où personne n’est d’accord, certains ignorent même le problème exact. Ce mouvement « spontané » était alimenté par une rumeur de la confrérie des orfèvres : votre emploi est menacé. A quoi il fut ajouté pour faire bonne mesure : on s’en prend à nos valeurs au nom de la mondialisation. En effet, un certain Paul parlait d’un Dieu universel, donc aux dépens de la déesse Artémis. Et pire encore, c’est l’Artémis d’Ephèse, l’Artémis locale qui était visée. Quel mépris du terroir ! 21ème siècle, tu n’es pas loin !

A Jérusalem quelque temps auparavant, même mouvement spontané. Une rumeur alimentée par les rabbins gagne vite la population : Jésus blasphème et veut détruire le Temple, l’emblème de la ville. Des paroles de Jésus un peu interprétées – manipulées ? – qui conduisent le peuple à la révolte. Tradition et patrimoine sont menacés. Alors, plein de bon sens, le peuple exige satisfaction : « Crucifie-le ! ». Il faut bien protéger les valeurs locales.

La volonté du peuple… Un peuple pas toujours au clair sur ses attentes – même chez les gilets jaunes – et croyant invariablement être maître de ses opinions. Néanmoins, il y eut des Ephésiens acceptant d’être éclairés par la Parole de Dieu, et des Juifs mettant leur foi en Jésus plutôt que dans les cris de la foule. Puissions-nous garder l’esprit clair dans les mouvements de foule. La foule n’a jamais beaucoup de discernement.

Pierre Lugbull