L’odeur du pardon

La difficulté avec la lecture, comparée au cinéma ou à la musique, c’est qu’aucun de nos 5 sens n’est vraiment touché directement.  En effet, s’ils le sont, c’est de manière indirecte ; il faut imaginer les paysages photographiés par l’auteur puis mis en mots sur les pages à tourner. Idem pour les sensations corporelles ou gustatives. Par ailleurs, c’est un travail remarquable, et sûrement difficile, de mettre en mots les sensations qui viennent en bouche lors de la dégustation de bons vins ! Chapeau bas à toutes les personnes chargées de rédiger les étiquettes aux dos des bouteilles ! 
Selon notre personnalité, notre caractère ou notre histoire, la lecture s’avérera plus ou moins facile car elle demande un effort pour se plonger dans ce que l’auteur aura voulu nous faire sentir, nous faire découvrir.
La lecture de la Bible ne fait pas exception à la règle. Même si beaucoup aimeraient la comprendre d’un coup d’un seul, il faut avouer qu’elle demande bien souvent un effort important de la part du lecteur. Loin d’être inaccessible (ce n’est pas son but, au contraire) elle livrera davantage de secrets à ceux qui y discernent davantage que le simple texte.
À ce titre, j’ai été surpris de trouver une exposition sur les odeurs et parfums de la Bible au musée de la Réforme à Genève. Je n’ai malheureusement pas eu le privilège de la visiter, mais je me rappelle m’être demandé comment il était possible d’avoir une idée aussi saugrenue ! Une exposition sur les senteurs de la Bible ?! Sérieusement ?! Mais moi je ne sens rien (avec mon nez j’entends!) lorsque je lis la Bible ! Et pourtant !
Intrigué, j’ai donc essayé de m’impliquer un peu plus dans la lecture du texte biblique en ouvrant bien mes narines (que celui qui a du nez pour sentir, sente !) et petit à petit j’ai lu comme jamais auparavant ! Mais oui, la Bible est pleine de senteurs ! 
Avez-vous déjà senti ces huiles préparées pour Aaron et ses fils ? Storax, ambre, galbanum parfumé. Voilà qui donnait une ambiance joyeuse et, dirait-on, de « shalom ». Un bien être pas seulement psychologique donc, mais spirituel ! Relisez Exode 30.30ss ou encore Psaume 133 où l’on se souvient du bonheur contenu dans la vision et la senteur de cette huile parfumée coulant sur la barbe d’Aaron.
Des exemples de ce type, il y en d’autres au fil des pages de l’Écriture. Il suffit d’ouvrir ses narines pour les sentir. Et plusieurs d’entre elles ont un objectif bien précis ! 
Je me souviens avoir médité sur la vision du prophète Ézéchiel au chapitre 46. Dans ce chapitre, et dans les précédents, on suit le prophète lors de sa visite guidée du nouveau temple de Dieu. L’Esprit le conduit, passant par les couloirs, par les endroits consacrés, etc. En somme, l’Esprit lui fait faire le tour du propriétaire. 
Mon esprit à moi s’est arrêté dans des pièces bien particulières. Des pièces auxquelles je n’avais jamais pensé auparavant : les cuisines ! Évidemment, pour faire des sacrifices, puis les manger, il faut des cuisines en assez grand nombre ! Ézéchiel a visité chacune d’entre elles, il les a vues. Moi, lecteur, je ne les ai pas vues, mais j’ai ouvert mes narines et j’ai imaginé l’odeur des viandes cuisant à l’extérieur du Temple. Vous sentez, vous aussi ? C’est une odeur prenante ! 
À la façon des premiers barbecues aux odeurs annonciatrices de l’été et du bon temps, l’odeur des viandes des sacrifices était elle aussi, j’imagine, chargée d’une signification particulière. L’odeur de ces viandes grillées, de ces bouillons, c’était sûrement, pour les juifs pieux, l’odeur… du pardon ! 
Par Jésus nous n’avons plus de sacrifices à offrir, mais depuis cette méditation d’Ézéchiel 46, l’odeur des barbecues continue de me faire penser à la joie, à la communion fraternelle, au pardon accordé. Et… oui, j’aime cette odeur !
Et vous ?
Kévin Commere