Dieu ne lui avait rien demandé : Jephté (2/2)

Texte de référence : Juges 11. 34

Nous voici de nouveau aux côtés de Jephté. Rentré d’un combat dont le Seigneur lui avait accordé la victoire, Jephté aperçoit avec terreur plusieurs personnes sortant de la maison familiale pour l’accueillir dans les joies et les danses. C’était en effet la coutume pour ces dames de recevoir ainsi les vaillants guerriers de retour de champs de bataille. Pourtant, et même si le texte ne le transcrit pas ainsi, les mélodies entraînantes et les percussions ressenties jusque sous les pas des héros n’ont pu être aussi fortes que le pouls galopant de Jephté. La raison de sa terreur intérieure ? Sa fille. Le problème ? Elle mène la danse de toutes les femmes venues célébrer les vainqueurs…

En effet, dans une folie tout humaine, Jephté avait promis qu’en cas de victoire il offrirait en sacrifice au Seigneur la première personne sortant de sa maison. Ce qui s’est passé dans la tête de Jephté demeure un mystère. Jusqu’à ce que le narrateur utilise un détail ouvrant peut-être, une voie de compréhension. Une voie pas moins tragique mais nous permettant de saisir les tenants et les aboutissants de cette catastrophe. Ce détail, c’est la désignation de cette enfant ; elle est la seule fille de Jephté. Verset 34 : « C’était son unique enfant ; à part cela, il n’avait ni fils ni fille. ». Un détail qui ne fait qu’amplifier la tragédie mais qui en filigrane, pourrait également nous renseigner sur les motivations de Jephté. Car en effet, Jephté savait bien que sa fille était la plus à même de sortir de la maison familiale en premier. Alors pourquoi formuler un tel vœu ?! Voulait-il vraiment sacrifier sa fille ? La réaction pleine de douleur et de tristesse de Jephté nous empêche de le croire : « Dès qu’il la vit, il déchira ses vêtements et dit : Ah ! ma fille ! tu m’accables, tu es au nombre de ceux qui m’affligent ! » (verset 35). 

Mais la désignation de l’enfant comme son unique ne va pas sans nous rappeler l’histoire d’Abraham et d’Isaac. Le Seigneur voulait éprouver la foi d’Abraham en lui demandant d’offrir Isaac, son fils unique, en holocauste. Cet épisode marquant a été fondateur pour la foi des hébreux. À l’époque, la foi et l’obéissance d’Abraham l’ont poussé à réaliser ce sacrifice jusqu’à ce que le Seigneur l’en arrête au dernier moment. Par cette obéissance remarquable, Abraham est ainsi devenu le père des croyants ! Mais alors que Jephté paraît déjà comme le juge-sauveur d’une situation désespérée, on pourrait se demander s’il n’a pas été tenté d’en vouloir plus. Pourquoi en rester au statut de super juge quand on peut égaler Abraham ?! Mais voilà, le silence du Seigneur sur l’histoire de Jephté est lourd de sens. Comme pour rappeler au lecteur qu’au final, Dieu ne lui avait rien demandé… 

On peut tous avoir un fils ou une fille unique, mais pour autant, n’est pas Abraham qui veut… Restons-en donc à ce que le Seigneur nous demande ! Et voilà pourquoi c’est important ! 

Kévin Commere