Christ seul [2/3]

Les Hommes ont un problème auquel ils n’ont pas encore trouvé réponse et ce quelque soit leur philosophie, leur religion.
Comme tous leurs frères et sœurs en humanité, les chrétiens, eux aussi, butent sur cette question. En fait, parce qu’ils proclament un Dieu d’amour et de grâce, c’est même une question très redoutable (la plus redoutable !) pour eux. C’est la pierre d’achoppement qui en a fait tomber plus d’un, et qui continuera à le faire jusqu’à la fin du monde.
La question est la suivante : si Dieu existe, pourquoi le mal ?
Puisque nous nous posons toujours la question aujourd’hui en 2017 c’est parce qu’aucune réponse vraiment satisfaisante n’a été donnée.
Pourtant des éléments de réponse se révèlent être des points de repère important. Plus jeune, j’ai pris bonne note de la réflexion d’Henri Blocher. Pour lui, « L’énigme du mal est le seul mystère « opaque » de l’Écriture. […] Le mal est radicalement étranger à la création et à son ordre ; il ne doit donc pas être compris, « pris- avec » , le reste comme s’il lui était homogène. On ne peut pas comprendre le mal comme mal, mais on peut comprendre qu’on ne peut pas le comprendre ! » (Henri Blocher, La doctrine du péché et de la rédemption, Collection Didaskalia, p. 25).
Autrement dit, en donnant une réponse à la question du mal, on lui donnerait immédiatement une place légitime dans l’ordre des choses. Or, c’est à l’antipode du message biblique.
Il nous faut donc accepter que le mal, à ce jour, existe. Point.
Mais pour autant ce n’est pas le dernier mot. Et c’est justement en cela que Christ seul, est LE repère dans ces ténèbres :
« Dans le monde bien réel de la douleur, comment quelqu’un pourrait-il adorer un dieu qui ne peut pas la ressentir ? Dans plusieurs pays d’Asie, je suis entré dans un temple bouddhiste et je me suis tenu avec respect au pied de la statue du Bouddha ; celui-ci est assis jambes et bras croisés, les yeux fermés, une ombre de sourire sur les lèvres, l’air absent, détaché des souffrances de ce monde. Chaque fois, il me fallait détourner le regard après un moment. Je me tournais en pensée vers l’être abandonné, écartelé, torturé sur la croix, des clous plantés dans ses mains et ses pieds, son dos lacéré, ses articulations étirées, son front saignant des piqûres d’épines, la bouche sèche souffrant d’une soif intolérable, et plongé dans l’obscurité loin de Dieu. Voilà mon Dieu ! Il a mis de côté son immunité à la douleur. Il est venu dans ce monde de chair et de sang, de larmes et de mort. Il a souffert pour nous. À la lumière de ses souffrances, les nôtres deviennent plus faciles à porter. Sur la marque laissée par la question de la souffrance de l’humanité, nous y apposons une autre, celle d’une croix qui symbolise la souffrance divine. » John Stott, La Croix de Jésus-Christ.
Nous autres chrétiens nous ne sommes pas mieux lotis que les autres par rapport à la question de l’existence du mal, mais nous ne sommes pourtant pas sans repère. Le Christ a souffert sur la croix.
Ou comme l’a très bien dit quelqu’un : le Christ n’est pas resté les bras croisés sur le mal et la souffrance de notre monde. Il n’a pas eu les bras croisés, non, mais les bras en croix. Et c’est radicalement différent.
En cela aussi, Christ est seul. Seul à comprendre notre souffrance. Seul à vraiment pouvoir comprendre ce par quoi je passe quand je me sens abandonné de tous. Et plus que capable de comprendre, il est celui qui a expérimenté cet abandon de la manière la plus douloureuse qui soit ; physiquement certes, mais spirituellement surtout (cf. toute sa détresse dans le jardin de Gethsémané avant son arrestation).
Ainsi la croix de Christ doit non seulement nous réconforter mais nous faire tomber à genoux d’étonnement et de reconnaissance car c’est justement pour nous sauver du mal et de la mort que Christ a vécu la mort (cf. Jean 3.16).
Oui, la réponse au pourquoi du mal ne nous est pas réellement donnée, mais notre souffrance est comprise. Plus que cela, elle a été portée dans la chair même de Dieu.
Il a vécu la mort certes, mais il l’a aussi vaincue ! Là encore il est bel et bien le seul en la matière ! 
Kévin Commere